vendredi 21 août 2009

Waiting

Ben Harper - Waiting For An Angel

Waiting For An Angel


Une soirée comme toutes les autres… faites d’apprentissage, d’ennui et de fatigue.

Une soirée arrivant chaque fois un peu plus tôt… trop tôt… et la nuit qui s’approprie alors le monde.

Elle est attablée à son plan de travail noyé de feuilles volantes éparpillées, noircies de phrases raccourcies et de schémas, formant un tapis de connaissances.

Elle fixe le vide, perdue… le mur d’un vert clair douteux, qu’ils doivent peindre depuis deux ans… le couloir sombre qu’elle aperçoit au-delà du cadre de la porte entrebâillée…

… la nuit noire à travers le velux qui la surplombait. Elle s’égare un peu plus, en pensées et ruminements… bien plus distrayants que cet ennui qui ne l’a pas quittée de toute la journée.

Le menton posé sur la paume, elle se perd dans le noir profond à peine bleuté d’une nuit d’automne. Un automne mi figue mi raisin… ni très froid, ni très pluvieux, juste à peine venteux à certains moments de la journée. L’accalmie avant la rudesse de l’hiver.

Elle attend… patiemment, mais tristement. Elle attend… sans savoir quoi espérer, trouver.

Attente. Patience. Espérance.

Elle attend… que la nuit noire lui offre quelque présent inavoué.

Elle attend de ne plus être seule… isolée du reste du monde lorsqu’elle s’enferme dans son bureau ou sa chambre… seule avec soi-même. Ne plus se sentir ridicule, s’imaginant à ses côtés une présence qui recevrait ses sourires amusés, complices, entendus ou tristes.

Elle attend… un signe, peut-être… un changement, sûrement. Elle espère… depuis tant d’années, toujours, tous les soirs, avec le ciel d’encre comme témoin et le silence comme avocat. Elle attend…

Quelque chose. Quelqu’un. Une présence… qui comblerait ce vide autour et en elle.

Réel ou immatériel. Infime ou immense. Peu lui importe sa nature. Qu’il vienne, avant qu’elle ne sombre définitivement dans l’oubli et la solitude.

Un ange.

Un ange gardien.

Elle attend un ange gardien… son ange gardien… qui viendrait et ne resterait que pour elle. Un compagnon de lumière… pour illuminer ses matinées trop tôt assombries, et affronter sans crainte ce qui la blesse chaque fois plus profondément.

Une douce compagnie pour égayer ses joies étouffées, et les partager sans méfiance, ni crainte.

Elle s’égare toujours dans le noir désormais insondable de la voûte céleste dont on ne peut apercevoir ses étoiles. Les nuages ont tôt fait de les dissimuler.

Elle ferme les yeux, un sourire las au coin des lèvres.

Une goutte.

Elle s’écrase sur la vitre. Le bruit mat, emplit brièvement la pièce froide.

Une goutte. Une autre. Encore une.

La pluie finit par tomber, fine, douce, singulièrement mélodieuse pour la saison.

Elle sourit. La musique sans note résonne entre les murs, comble le vide qui l’entoure. Son cœur s’allège doucement. Voilà qu’elle n’est plus si seule que cela.

La pluie faiblit à peine… puis c’est l’averse qui chute sur la ville, et sur sa vitre… juste au-dessus de la tête. Elle ouvre les yeux et regarde. La vitre se noie sous les trombes d’eau. La pièce se remplit de sons et de percussions… une foule l’a envahie.

Un bruit sec, presque aigu, dur et mordant… suivi de plusieurs autres chocs… la grêle s’abat au-dessus d’elle. Elle voit de petits grains blancs, translucides, se briser sur la vitre, rouler tout le long puis disparaître.

Elle rit. Elle a compris.

Il est là. Il a toujours été là. Au-dessus d’elle. Toujours.

Son Ange de Pluie. Son Ange d’Eau.

Celui qui lui tient compagnie sans le montrer. Celui qui parvient à lui arracher un sourire, même triste, alors que tous ont échoué face à sa mine lasse.

Elle pose sa tête sur les feuilles. Elle écoute…

Elle l’écoute conter les caprices du temps, l’avancée de l’automne, l’air qui se refroidit doucement. Elle l’entend s’amuser du comportement des gens qui courent s’abriter de la pluie avec agacement.

Elle l’entend reformuler sa promesse… de toujours veiller sur elle, de là-haut. Elle l’entend lui demander de promettre à son tour.

De ne jamais oublier comme cette nuit… oublier qu’il est là, pour elle, pour toujours. Lui ne l’oublie jamais. Il la regarde d’en haut, de jour comme de nuit.

L’écho s’affaiblit… et finit par disparaître. L’eau ruisselle quelques instants sur la vitre. Le silence retombe dans le bureau. Ses oreilles bourdonnent encore légèrement.

Elle se redresse, la mine plus éclairée et avenante. Elle murmure quelque parole que lui seul peut entendre même s’il semble parti.

Elle attendra… qu’il revienne. Il reviendra, comme toutes les fois. Il reviendra avant qu’elle ne sombre. Il la sauvera encore une fois.

Elle attend son retour…

… son Ange Gardien.


M.Y.
08/11/2007

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